JUSTICE
Un an ferme pour avoir extorqué de l’argent aux agents de nettoiement sous ses ordres
AMIENS Accusé d’avoir obtenu de l’argent en échange de services imaginaires, l’ancien agent de maîtrise de 58 ans
a nié les faits sans convaincre les magistrats du tribunal, jeudi. Il écope d’un an de prison ferme.Réagir Mis en ligne le 14/01/2022 à 18:02
par Gautier LecardonnelLes agents ont fait l’objet de promesses de titularisation, ou de menaces de fin de contrat ou encore obtentions d’heures supplémentaires.
L’ancien agent de maîtrise de la ville d’Amiens reste droit dans ses bottes à la barre du tribunal correctionnel d’Amiens ce jeudi : il nie l’intégralité des faits qui lui sont reprochés. Mohamed Teurki, 58 ans, embauché en 2002 et titularisé quatre ans plus tard, était responsable d’équipe du secteur centre au service du nettoiement (il a été licencié). Il est accusé d’avoir profité de sa position pour extorquer de l’argent à des agents. Il avait été interpellé en avril 2018, rue Alfred-Catel sur son lieu de travail, et il avait passé 12 jours en détention provisoire.
« On pensait de lui qu’il avait le bras long parce qu’il avait des relations avec l’ancien maire. »
Ses accusateurs sont assis sur le banc des parties civiles du tribunal. Elles maintiennent leurs accusations.
Jean-Luc, un agent d’entretien fragile car en situation de handicap, qui est à l’origine de l’enquête suite à son dépôt de plainte, dit que le prévenu lui a fait miroiter une titularisation, qu’il lui avait aussi proposé une protection suite à une agression, ou encore pour des réparations sur une voiture qui n’ont jamais été faites. En quelques mois, il a vidé son compte bancaire (8 960 euros) puis celui de sa concubine (8 790 euros) pour, dit-il, donner l’argent à l’agent de maîtrise. Il indique également avoir subi des violences quand il ne payait pas.
Un autre agent, handicapé lui aussi, dit avoir versé 60 euros par mois pendant près de quatre ans par peur d’être viré. Un troisième dit avoir versé 800 euros en échange de l’octroi d’heures supplémentaires, un quatrième d’avoir prêté 500 euros, jamais remboursés, lui aussi pour obtenir la possibilité de faire des heures sup.
Mystère sur sa carrière
« On pensait de lui qu’il avait le bras long parce qu’il avait des relations avec l’ancien maire, son neveu étant marié avec sa fille », avait expliqué l’une des victimes. Entendu lors de l’enquête, Gilles Demailly « découvrait presque l’existence » de l’agent de maîtrise, rapporte le président. Le prévenu s’il dit être encarté au PS depuis longtemps, nie avoir usé de ce prétexte. Son obtention rapide du poste d’agent de maîtrise sans concours ni diplôme, restera un mystère du dossier. L’ancien directeur de cabinet, qui le connaissait pour son appartenance au PS, avait indiqué n’être jamais intervenu en sa faveur.
Un gros joueur
Le quinquagénaire crie au complot. Me Stéphane Diboundje et l’élève avocate Élise Caron, plaident la relaxe : « Vous avez des individus qui disent qu’ils étaient d’accord pour donner de l’argent, cela s’appelle de la corruption de fonctionnaire. Pour qu’il y ait une personne corrompue, il faut qu’il y ait des corrupteurs ! », ont-ils notamment dit. Pour les victimes, les avocates Mes Florence Brochard-Bédier et Marie-Christine Missiaen mettent en avant leur profil fragile, arguant que la contrainte morale est bien là : « Il sait à qui il avait affaire et comment il fallait faire pour arriver à son but ».
Le mobile semble établi : la grosse activité de jeux d’argent du prévenu. Un gérant de tabac avancera la somme de 1 500 euros joués chaque mois en jeux de grattage.
Mohamed Teurki est condamné à 18 mois de prison dont 6 mois avec sursis. La défense a indiqué qu’elle faisait appel.
Gautier Lecardonnel
source courrier picard :https://premium.courrier-picard.fr/id268930/article/2022-01-14/amiens-un-ferme-pour-avoir-extorque-de-largent-aux-agents-de-nettoiement-sous