C’est l’histoire de deux frères, Yassine et Younès, nés au Maroc et entrés en 2015 de façon régulière sur le territoire pour suivre des études de pharmacie. Deux frères qui ont grandi ensemble, se sont épaulés dans ce voyage pour un avenir meilleur. Mais depuis bientôt 2 ans, l’un d’entre eux est menacé par une OQTF. Les deux jeunes hommes sont pourtant dans la même classe, ont le même parcours universitaire -ou presque- mais pas le même traitement. Une déchirure pour ces deux étudiants amiénois dont les camarades d’université reconnaissent sérieux et engagement.

Yassine et Younès Bouri sont arrivés en France le 17 aout 2015 avec un visa étudiant. Fraîchement bacheliers et tout juste sortis du lycée Descartes, établissement français à Rabat, les deux jeunes frères s’installent à Amiens pour entamer des études en pharmacie. Dans ce cursus, les candidats sont nombreux et les places sont chères. Mais ils s’accrochent, parfois échouent, redoublent d’efforts mais toujours ensemble. « Ca n’a pas été simple, il y a eu du découragement parfois face à des études extrêmement difficiles mais on a tenu bon » , confie Yassine.

Les deux frères ont fini par valider toutes leurs années d’études dont celles de la PACES (Première Année Commune aux Etudes de Santé) et leur deuxième année de pharmacie, deux années au tri drastique.

Malgré leurs efforts qui leur ont permis de surmonter leurs échecs, il y a un peu moins de 2 ans, le visa étudiant de Yassine n’a pas été renouvelé. Younès, pourtant dans la même situation, lui, pouvait continuer à étudier de façon régulière sur le territoire. « Une situation incompréhensible » pour son avocat, Me Diboundje, qui demande la régularisation de son client. Les deux frères ont déposé leur dossier le même jour, ont le même parcours mais pas le même traitement. « On traite les dossiers de façon mécanique. Si au départ, l’examen du dossier était plus attentif on ne serait pas obligé de mobiliser tout le monde pour régulariser » s’agace t-il.

Depuis qu’il a reçu cette obligation de quitter le territoire, Yassine vit la peur au ventre. Encouragé par son frère et ses proches, il a déposé une nouvelle demande de renouvellement de son titre de séjour, ce jeudi 3 février. Son avocat Me Diboundje en appelle à « la raison commune » . « Dans un contexte actuel de crise sanitaire, où les pharmaciens sont des acteurs majeurs, comment la France peut-elle tourner le dos à de futurs talents qui croient en elle ? » tance l’avocat.

A AMIENS, PLUSIEURS ASSOCIATIONS VENANT EN AIDE AUX SANS-PAPIERS, LA CIMADE, RESF ET LE CASP DÉPLORENT L’ABSENCE DE DIALOGUE AVEC LA PRÉFECTURE DE LA SOMME. ELLES APPELLENT AU RETOUR DES DISCUSSIONS ET DES CONCERTATIONS AVEC LA PRÉFÈTE MURIEL NGUYEN. 

Et ces talents comme Yassine sont nombreux, parfois isolés et livrés à eux-mêmes face à une administration obtuse qui porte encore les stigmates d’une gestion de crise sanitaire chaotique. Il y a quelques mois, nous évoquions une histoire similaire, celle d’Hanaa Korso Tlemsani. Dans la même promotion que Yassine et Younès à l’Université de Picardie, elle nous avait fait part de leur histoire et de cette déchirure que ces deux frères originaires du Maroc devaient affronter. Dans un élan confraternel et humaniste, elle nous avait raconté leur désarroi, leurs craintes, leurs espoirs aussi.

Yassine Bouri et son frère sont de nationalité marocaine. Entrés régulièrement sur le territoire, l’un d’entre eux est menacé par une OQTF. Soutenus par la Licra Picardie et SOS Racisme, leur avocat demande la régularisation.

Depuis, Hanaa a été régularisée. Un espoir de plus pour Yassine. A quelques semestres de la fin de leurs études, les deux frères, en master de pharmacie à l’UPJV, pensent aux sacrifices effectués pendant ces années, la famille qu’ils ont quittée et qu’ils ne peuvent plus voir depuis si longtemps. Voyager dans leur situation signifierait se séparer. Younès a du mal à le supporter. Dans sa voix, cassée par l’émotion, la peur se fait sentir et il ne suffit que d’une seule question pour s’apercevoir des dommages causés par ce traitement déséquilibré. Certains appelleraient ça une « injustice » , d’autres parleraient « d’aléa » mais derrière ces opinions ne se cache en réalité qu’un seul fait, celui de destins méprisés.

La Préfecture de la Somme précise au Courrier picard qu’un tel choix est motivé par les résultats de Yassine, plus faibles, une précision qui laisse le jeune homme amer, lui qui ne comprend toujours pas pourquoi il n’aurait pas droit à un traitement comparable à tous les étudiants de son cursus.

sourcehttps://amienois-e.fr/deux-freres-quune-france-separe/