Le bébé est mort d’avoir été secoué
Adryanno est décédé à l’hôpital d’Amiens le 25 juillet 2014 à l’âge de 6 semaines. Le procureur a été averti de possibles violences à son encontre. S’en est suivie une longue enquête, principalement axée sur des rapports médicaux. La conclusion de la dernière expertise est implacable : le bébé est d’un hématome sous-dural. « Il a été victime, au moins trois épisodes de secouements violents. » Le père et la mère de l’enfant risquent d’être jugés devant la cour d’assises de la Somme. C’est en tout cas ce que réclame le procureur de la République de la Somme à l’issue de l’enquête. Même si les parents nient, le dossier contient selon lui suffisamment d’éléments pour qu’ils répondent de violences ayant entraîné la mort sans intention de la donner. Le juge d’instruction décidera s’il suit ces réquisitions ou non.
Le père, 26 ans, et la mère, 23 ans, qui sont séparés depuis, nient les faits. Ils habitaient dans un studio, rue Henri-IV, en plein centre-ville d’Amiens, quand le drame est arrivé. Ils ont expliqué qu’après avoir pris son biberon, le bébé s’est senti mal. Ils l’ont emmené tout de suite chez le médecin, qui n’était pas là, puis chez les parents du père. C’est là que les secours ont été alertés.
Le père, qui a passé trois mois derrière les barreaux, et que nous avions rencontré, a toujours nié les violences: « Je n’osais même pas prendre le bébé dans les bras pour lui donner le biberon, de peur de lui faire mal ». Au cours de l’enquête, il a soutenu qu’Adryanno s’est peut-être cogné la tête dans son cosy quand ils ont quitté précipitamment l’appartement. « Je veux savoir de quoi mon fils est décédé », nous confiait-il en mai 2016. À ce stade de la procédure, l’origine du décès restait un mystère : « L’examen des différents organes n’a pas permis d’identifier d’arguments en faveur d’un syndrome du bébé secoué ou de lésions traumatiques, récentes ou anciennes », avait conclu le médecin légiste. Depuis, après d’autres examens, les médecins ont jugé que les déclarations du père étaient incompatibles avec les blessures constatées. Et, note le parquet, le jeune homme a consenti qu’il avait du mal à supporter les pleurs de son fils.
La mère, limitée intellectuellement, nie être responsable de la mort de son fils. Au cours de l’instruction, assistée par Me Houria Zanovello, elle a chargé son ancien concubin. Elle a déclaré avoir assisté à des scènes de violences, et avoir elle-même subi les foudres de son ancien concubin, qui n’hésitait pas, selon elle, à l’enfermer dans l’appartement pour aller passer du bon temps avec ses copains. Dit-elle vrai ? C’est l’un des mystères de cette affaire. Car même les membres de sa famille ont soutenu qu’elle avait une fâcheuse tendance à mentir…
La vérité n’est donc pas encore connue. Et pour Me Stéphane Diboundje, l’avocat du père, les charges ne sont pas suffisantes pour renvoyer son client aux assises : « Après quatre ans d’instruction, on se retrouve avec des expertises non concordantes, sans aucune certitude sur l’identité de l’auteur des éventuelles violences et avec les dénégations totales des deux parents. Nous sommes dans le flou le plus total. »